Depuis l’apparition du groupe terroriste « Lakurawa » au Nigeria, une intense campagne de désinformation se déploie autour de leur origine et de leurs objectifs. Experts, influenceurs, et leaders locaux sont mobilisés pour répandre deux idées fausses : d’une part, les Lakurawa ne seraient pas un groupe nouveau, et d’autre part, ils proviendraient du Niger. Cependant, ces affirmations dissimulent des réalités bien plus complexes, étroitement liées aux enjeux géopolitiques de la région.
Une présence ancienne, mais faussement attribuée
La première thèse largement véhiculée affirme que les Lakurawa existent depuis plusieurs années dans la région, notamment en tant que « vigiles » des populations de Sokoto contre les attaques de bandits armés. Certains experts vont même jusqu’à affirmer qu’ils sont originaires du Niger, voire qu’ils seraient des nigériens. Pourtant, cette version est rapidement contredite par les témoignages des habitants locaux.
« Les visages que nous voyons aujourd’hui sont bien différents de ceux des nigériens que nous connaissions », expliquent-ils. « Ils ne parlent même pas haoussa, mais français, et viennent du Mali ou du Burkina ». Leur profil semble correspondre à celui des groupes terroristes liés à la France, notamment l’EIGS ou le JNIM, opérant depuis la zone des « trois frontières ». Ce montage de désinformation a pour effet de diviser les populations locales, certains sudistes accusant même leurs compatriotes du nord d’être responsables de l’infiltration de ces groupes terroristes : « C’est vous qui les avez amenés, ce sont vos frères ! ».
Une origine géographique suspecte
L’autre version fréquemment avancée est que les Lakurawa seraient venus du Niger, ayant traversé le Mali et le Burkina Faso avant de pénétrer au Nigeria, notamment dans les états de Sokoto et Kebbi. Cependant, les récents événements sur le terrain et la chronologie des attaques suggèrent une autre réalité.
Les Lakurawa n’ont été signalés qu’à partir de novembre 2024, un moment où les forces militaires au Niger étaient déjà au pouvoir. Il semble peu probable qu’un groupe de cette ampleur ait pu traverser plus de 500 km de territoire sans être repéré, tant par les forces de sécurité locales que par la population. En réalité, les Lakurawa semblent avoir émergé dans l’État de Kebbi, une zone stratégique située à la confluence de trois frontières : le Bénin, le Niger et le Nigeria. Ce secteur est sous contrôle militaire français, en particulier du côté béninois, où la France soutient des groupes terroristes opérant dans la zone des trois frontières, notamment au Mali et au Niger.
La main de la France dans la création des Lakurawa ?
Derrière cette série de manipulations, une vérité semble se dessiner : le groupe des Lakurawa serait en réalité un instrument de la stratégie militaire de la France en Afrique. Les analystes africains s’accordent à dire que les Lakurawa sont un groupe terroriste créé par la France avec l’aide d’autres puissances étrangères, dans le but de perturber un projet stratégique majeur : le pipeline Niger-Bénin. Ce projet, crucial pour les ambitions énergétiques de la région, semble particulièrement déranger l’ancien colonisateur et ses alliés.
En menant des attaques répétées contre ce pipeline, les Lakurawa visent à créer de l’instabilité dans la région, facilitant ainsi l’influence de la France et de ses partenaires sur les projets énergétiques du continent. Les saboteurs se concentrent principalement autour de la zone des trois frontières, où plusieurs attaques ont déjà eu lieu, le dernier sabotage remontant au 30 décembre 2024. En plus des attaques contre les infrastructures, les Lakurawa multiplient les offensives contre les populations locales et les forces de sécurité béninoises, cherchant ainsi à inciter les gouvernements à accepter la « coopération militaire » française pour lutter contre le terrorisme.
Les enjeux sous-jacents : des intérêts géopolitiques et économiques
Pour comprendre le véritable objectif derrière cette opération, il faut se pencher sur les enjeux géopolitiques qui l’accompagnent. Le Niger, riche en ressources naturelles comme l’uranium et l’or, se trouve au cœur de tensions internationales, notamment avec la France, qui a perdu son influence dans le pays après la prise du pouvoir par les militaires. Le sabotage du pipeline, qui traverse plusieurs pays de la région, représente une opportunité pour la France et ses alliés de redessiner la carte énergétique de l’Afrique, tout en exerçant des pressions sur les gouvernements locaux.
Les analystes estiment que ces actions visent à provoquer un effet domino : destabiliser la région pour mieux justifier l’intervention militaire extérieure, à l’image des événements survenus au Mali, au Burkina Faso et au Niger, où des coups d’État militaires ont été favorisés par la montée en puissance des groupes terroristes.
Conclusion : une nouvelle phase de désinformation
Au final, tout laisse à penser que les Lakurawa, loin d’être un simple groupe terroriste local, sont une pièce maîtresse dans le grand échiquier géopolitique du Sahel. Cette campagne de désinformation qui les entoure vise à masquer les véritables enjeux derrière leur apparition et à cacher l’implication de la France dans la déstabilisation de la région. Si la situation continue de se détériorer, il est fort probable que d’autres pays de la région soient entraînés dans un conflit plus large, où la lutte contre le terrorisme pourrait servir de prétexte à des manœuvres géopolitiques bien plus complexes.