mardi, décembre 3, 2024
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SOUDAN : la presse soudanaise va en guerre contre le colonel Omar el-Béchir.

Le Soudan vit sous une pression des manifestations depuis le 19 décembre dernier. Des manifestions de toutes catégories : des journalistes, enseignants, activistes, médecins, politiciens…Si les autres manifestants contestent contre les prix de pain qui a triplé et le manque d’essence, les journaliste revendiquent la liberté de presse et les médecins quant à eux demandent la démission immédiate du président Omar El-Bechir et que un gouvernement de transition soit formé.

Les protestations se poursuivent à Khartoum et dans plusieurs autres villes, où l’état d’urgence a été déclaré. Des villes dans 12 états du Soudan manifestent contre le prix de pain qui a triplé et contre le manque d’essence. Les manifestations ont fait 8 morts selon le régime, 22 selon l’opposition. Ce lundi 24 décembre, un mouvement de grève a débuté dans plusieurs secteurs à Khartoum. À l’instar de certains manifestants, les médecins demandent le départ du régime Omar el-Béchir.

Depuis le lundi passé plusieurs secteurs étaient bloqués à Khartoum suite aux manifestations. Les universités ont été fermées et les hôpitaux n’ont plus reçu que les cas graves. L’état d’urgence a été déclaré dans plusieurs villes et les réseaux sociaux sont toujours coupés.
Selon Sadek al Mahdi la tête penchant de la coalition de l’opposition soudanaise avait annoncé le samedi dernier, lors d’une conférence de presse, que le « peuple veut un changement du régime ».

Face à la contestation quasi inédite qui dure depuis une semaine, le régime est mis devant un examen décisif qui pourra définir son avenir politique. Un avenir qui, devant l’impasse actuelle, semble lié à l’amélioration économique et aux réformes de l’Etat. Les protestations actuelles font remonter à la surface les problèmes des libertés, de la démocratie, et des droits de l’homme dans le pays.
Car derrière le prix du pain, il y a un ras-le-bol général chez la majorité des soudanais. Déjà en janvier dernier, des protestations contre la cherté de la vie se sont soldées par l’emprisonnement de dizaines de personnes. Mais les choses ne se sont pas améliorées depuis, bien au contraire : en 2018, les difficultés économiques se sont accrues avec une inflation de près de 70% et une livre soudanaise qui a plongé face au dollar américain.
Pour une majorité de Soudanais, le colonel el-Béchir ne répond plus aux besoins économiques du pays par manque de dynamisme. Au pouvoir depuis 1989, il avait assuré qu’il ne se présenterait pas pour la présidentielle de 2020. Mais son parti, le Congrès national, l’a désigné en octobre dernier comme candidat à cette présidentielle. L’opposition considère que cela fera de lui un président à vie.
Une majorité de citoyens contestent également la politique étrangère changeante du régime soudanais et ils n’approuvent toujours pas la participation de leur pays à la guerre au Yémen.
Les journalistes et la liberté de presse
Selon le classement mondial de la liberté de presse établi par reporter sans frontière, le Soudan est classé 174ème/180 pays. La presse a subit et continu de subir de censure, saisies, menaces : rien n’est épargné aux journalistes qui prétendent couvrir et révéler la nature dictatoriale du régime d’Omar.
Depuis mardi, plus de trente d’entre eux se sont lancés dans une grève de la faim contre la fermeture du quotidien indépendant Al-Tayyar. Reporter et chroniqueuse dans le journal, Shama’il-Alnour explique au Guardian les raisons de cette montée en puissance : « C’est la première grève de la faim de toute l’histoire de la presse soudanaise, et la première qui se produit en dehors d’une prison. Notre revendication principale, c’est, bien sûr, la levée de la suspension de notre journal, mais nous allons plus loin en utilisant le cas d’Al-Tayyar comme un exemple pour tous ceux qui défendent la liberté d’expression. »
Interrogé par la Radio France Internationale (RFI), le directeur dudit journal affirme que « Cette grève de la faim, c’est la troisième étape de protestation de nos journalistes depuis la suspension, il y a trois mois, de notre journal. Nous avions commencé par des manifestations, puis une pétition a recueilli un million de signatures dans et en dehors du pays. Maintenant, avec cette grève de la faim, nous entendons faire entendre davantage notre voix et le cas de notre journal. Mais plus généralement, c’est sur la situation des libertés au Soudan que nous voulons alerter. Elle n’a jamais été aussi catastrophique. »
Outre la fermeture pure et simple du quotidien, les journalistes protestent également contre la menace qui pèse sur la tête de leur rédacteur en chef, Osman Mirghani. Au mois de décembre 2015, après une série d’articles critiques sur le gouvernement, puis un éditorial appelant à un « printemps arabe » dans le pays, il a été arrêté par les services secrets, et il encourt la peine de mort. Au Guardian, Osman Mirghani, reclus chez lui dans l’attente de la sentence, n’en démord pas et dit espérer que la grève de la faim permettra d’aller au-delà de la simple alerte sur la suspension d’Al-Tayyar. « Le meilleur débouché que nous pourrions espérer, c’est que ce mouvement des journalistes ouvre à une culture de la protestation tout à fait pacifique, qui se répande dans tout le peuple soudanais. »

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